Boss Hors Normes
Semaine pour l'emploi des personne en situation de handicap : Droit Pluriel met en lumière les créatrices et créateurs d'entreprise !
Habillez vous responsable - Manon, 25 ans, créatrice d’appli
L’appli va sortir ce mois-ci ! Elle permettra de connaître l’impact d’un vêtement sur l’environnement, l’humain et la santé. En scannant l’étiquette de votre pantalon, vous saurez s’il a été conçu dans des conditions respectueuses de ce qui vous apparaît primordial : la planète, les conditions de travail et la garantie qu’il n’est pas nocif.
Nous sommes 5 personnes mobilisées : mon associée, un prestataire, deux stagiaires et moi-même.
J’ai effectué un parcours à la fac et j’ai eu la chance de profiter d’une formation spécifique à HEC, un programme visant à encourager les entrepreneurs en situation de handicap. J’ai une maladie rare qui m’oblige à certains soins qu’il faut concilier avec mon emploi du temps professionnel. Actuellement, j’exerce aussi une activité salariée.
Lorsque j’ai créé mon entreprise, je savais que je pouvais bénéficier de certaines aides mais je ne les ai pas demandées car elles m’auraient empêchée cet emploi : il ne faut pas dépasser certaines ressources pour y avoir droit. C’est problématique car, évidemment, quand on monte un projet, il est rare de pouvoir en vivre immédiatement.
Ce qu’il y a de spécifique à être en situation de handicap quand on est cheffe d’entreprise ? Je ne sais pas : je suis née comme je suis, je ne me vis pas comme limitée. Je suis bien entourée, je crois en mon projet et j’aime ce que je fais !
L’info de H-UP : quelles aides pour créer mon entreprise ?
Le créateur handicapé, outre les aides standards, peut solliciter l’agefiph et bénéficier de l’aide spécifique à la création d’entreprise. Il est important de noter que cette aide ne peut être obtenue postérieurement à la création.
Des fleurs, des ânes et un rythme adapté - Alan, 27 ans, horticulteur.
J’ai 27 ans. L’école, pour moi, cela a été compliqué. Pourtant, j’avais une AVS sympa avec qui je m’entendais bien. J’ai testé une ULIS, une classe intégrée et puis je suis retourné dans un cadre classique. Le souci était que j’étais vite fatigué et j’avais du mal à noter tous les cours. Je suis autiste asperger.
Je me suis orienté vers un bac pro mais les stages en entreprise ne se sont pas très bien passés. Je ne me voyais pas travailler dans ce milieu. Je n’ai pas été au bout de mon bac horticulture. J’ai traversé une vraie dépression, je ne voyais pas ce que je pourrai faire de ma vie. Les ESAT que j’ai visité à cette époque ne me correspondaient pas. J’avais besoin d’une solution intermédiaire entre l’entreprise et le milieu protégé : un cadre stimulant mais qui m’accepte comme je suis. En France, ça n’existe pas ou très rarement.
Puis un jour, lors des portes ouvertes de mon lycée d’horticulture, ma prof m’a proposé de vendre les plantes carnivores que je produisais. Et là, je me suis dit : « Et si c’était ça ma vie : créer ma propre activité, vendre des plantes carnivores ». J’ai créé mon activité il y a cinq ans, je vis maintenant dans ma maison en Bretagne avec ce terrain de 180 mètres carrés où se côtoient les fleurs carnivores et les ânes.
Ma mère est très présente, elle a géré l’aspect administratif. Je n’aurais pas pu le faire seul. Elle travaille maintenant avec moi au sein de « Fleurs et Ânes d’Armor ». Elle est reconnue aidante familiale mais le statut d’aidante professionnelle n’existe pas et c’est dommage.
Créer mon entreprise m’a donné de l’assurance. C’était la solution idéale pour être à mon
rythme. De nombreux parents d’enfants autistes voient mon expérience comme une piste inspirante. Moi j’aimerais quand même que les entreprises prennent mieux conscience de l’apport de personnes autistes. J’ai choisi les plantes carnivores : Parmi toutes les plantes, j’ai choisi les plantes carnivores. Elles sont singulières, il n’y a pas de hasard...
L’info de H-UP : Quel statut pour les personnes travaillant autour du chef d’entreprise en situation de handicap ?
Les travailleurs indépendants peuvent demander la reconnaissance de la lourdeur de leur handicap et bénéficier le cas échéant d’une enveloppe annuelle pour rémunérer des aidants professionnels.
Découvrez Fleurs et ânes d’Armor !
Eugénie, 42 ans, conseil en aménagement - Chacun a son beau !
Le tout, c’est de bien s’entourer. Parce qu’il faut dire que pour les démarches à faire lorsqu’on veut créer son activité, les choses ne sont pas pensées pour être simples. Et au quotidien, il faut « composer en équipe » avec les atouts mais aussi avec certaines difficultés liées au handicap.
Je me suis associée avec Myriam il y a quatre ans, c’était une amie de ma sœur. Nous sommes différentes et très complémentaires. Elle est issue du monde des grandes entreprises, je suis plutôt autodidacte. Je suis autiste alors les relations avec les clients, ce n’est pas toujours évident, idem pour m’organiser et pour assimiler certains codes et des tas de détails importants.
Nous avons créé une SAS, société anonyme simplifiée qui propose du conseil en aménagement accessible. Nous concevons des espaces agréables pour des personnes neuro-atypiques, et d’autres formes de handicaps sensoriels et cognitifs.
Diriger ma propre entreprise me permet de m’organiser comme je veux ce qui est précieux parce que je peux suivre le rythme qui me convient. En revanche, je dois assurer un chiffre d’affaires pour poursuivre l’activité et cela est contraignant. La forme juridique de notre projet n’offre aucune compensation liée au handicap. Un auto-entrepreneur ou Travailleur Indépendant en situation de Handicap pourrait bénéficier d’avantages que nous n’avons pas. Par exemple, nous n’avons aucune aide de l’agefiph et nos clients ne peuvent se prévaloir de faire appel à un prestataire dont 50% de l’équipe est en situation de handicap. Cela n’est pas très juste car je créé mon propre emploi, et de la valeur économique. Il faudrait que je consacre plus de temps et d’énergie à m’informer sur les aides possibles mais franchement, quand on a une entreprise à faire tourner, vous croyez qu’on a beaucoup de temps pour cela ? Le système devrait se montrer plus incitatif en proposant une information claire et facile d’accès.
L’info de H-UP : quels avantages pour mes clients qui s’adressent au travailleur en situation de handicap ?
Les travailleurs indépendants en situation de handicap sont éligibles aux déductions provenant de la loi sur l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés et selon des modalités, leurs prestations sont déductibles de l’obligation d’emploi.
Marlène, co-créatrice de l’entreprise INCLOOD - Des livres et des signes !
Mon amour de la lecture m’a poussé à entamer un BTS Edition à Paris, où j’ai découvert le monde de l’édition. J’ai ensuite enchaîné avec une licence professionnelle « Métiers du Livre ». Mais, une fois ce diplôme en poche, j’ai eu énormément de mal à trouver un travail. Le secteur est bouché. A suivi une longue traversée du désert au niveau professionnel.
N’ayant aucune expérience en commerce ou en marketing, j’ai décidé en 2016, d’initier une formation au « Labo de l’édition » destiné à la création d’entreprise, en binôme avec une associée, sourde comme moi. Il a fallu franchir le pas et se former, car créer une entreprise peut faire peur. Surtout, il a fallu constituer un dossier de demande de financement des interprètes FR-LSF, auprès de l’AGEFIPH.
Le délai de réponse est souvent long, rien que les démarches destinées à mettre en place à l’accessibilité de cette formation et les suivantes sont énergivores et constituent une charge mentale conséquente.
Durant cette formation, j’ai songé au concept d’un livre qui soit accessible, inclusif grâce au numérique. C’est ainsi que l’idée d’un livre bilingue, en français écrit et en langue des signes française, est née.
L’accès au livre grâce au bilinguisme m’a paru essentiel, car c’est une forme d’appropriation du livre pour les sourds. Encore aujourd’hui, une grosse majorité d’enfants, voire d’adultes sourds restent réfractaires à la lecture, faute d'enseignement adapté de la langue française à l'école
Créer une maison d’édition est ma façon de militer, de valoriser la langue des signes, qui est à mon sens source d’épanouissement et la clé pour accéder à toutes les connaissances. A long terme, je souhaiterais que l’entreprise s’agrandisse pour permettre la création d’emplois et l’embauche de professionnels sourds, qui connaissent un très haut taux de chômage.
Quand on est entrepreneure, chaque jour représente un défi. On doit sans cesse se former pour renouveler ses connaissances. Si j’avais un conseil pour les futurs entrepreneurs en situation de handicap, ce serait « Informez-vous, formez-vous et surtout osez ! »
Yola, 46 ans, coach - De fil en aiguille... s’épanouir !
Depuis toujours, j’écoute les autres et j’aime les accompagner dans la réalisation de leurs objectifs : cela a commencé par une copine à l’école qui voulait assumer sa féminité, plus tard c’était ma boss qui souhaitait une promotion professionnelle... En même temps, j’ai développé, très jeune, une passion pour le textile.
Dyslexique, j’ai eu de grosses difficultés scolaires. Je travaillais énormément mais j’avais le sentiment de courir après un cheval au galop. La dyslexie ne se guérit pas : on s’adapte. J’ai compensé en m’investissant et en donnant sans compter dans le travail. J’ai intégré diverses entreprises de textile. Là, j’ai choisi de ne pas parler de ma dyslexie. J’adorais mon métier mais il y a 4 ans, j’ai fini par faire un burn-out.
Un jour, j’ai réalisé que mes connaissances et mon goût d’aider les autres à s’accomplir pouvaient devenir un métier : coach. J’ai créé deux entreprises : « Simplement Etre Soi », j‘y propose un coaching holistique qui allie le mental, la relation au corps et l’énergétique. A côté, « Mode En Soi », plus orientée vers les créateurs de mode, dans laquelle je fais aussi du consulting.
Pour mettre fin aux remarques parfois désagréables concernant ma façon d’écrire les mails, j’ai ajouté un tampon « certifiée dyslexique » à ma signature. Pour aller au bout de ses envies, pas de secret : il faut être soi.
L’info de H-UP :: quelles aides pour le travailleur indépendant en situation de handicap ?
Aucune aide spécifique n’est accordée au travailleur indépendant.
Découvrez Simplement Etre Soi !
Julien, Le rap dans la peau
J’ai monté ma 1re boîte il y a plus de 20 ans maintenant, c’était déjà dans le secteur musical. J’ai démarré dans le téléchargement de sons, à un moment où cela commençait à se développer en France. Le rap et les musiques urbaines se sont vite imposés dans mon univers. J’ai eu la chance de travailler avec les plus grands noms de la scène urbaine comme Jul, PNL, Marwa Loud, etc.
Il y a deux ans, j’ai fait une pause et vendu mon entreprise. J’ai pris le temps de réfléchir, remettre en jeu mes choix et puis finalement décidé de rester dans la musique. J’ai créé un nouveau label, rencontré de nouveaux artistes.
Je suis aveugle et le moment où j’ai perdu la vue coïncide avec la création de ma première entreprise alors je ne dirais pas que cela m’a freiné. Je m’adapte, mon équipe et les artistes aussi. Au départ, il m’a fallu acheter le logiciel Jaws, et la voix qui allait avec. J’ai bénéficié des aides de l’agefiph pour cela, car j’étais salarié. Aujourd’hui, j’ai un ordinateur avec synthèse vocale, c’est le seul équipement adapté dont je me sers. Le reste, c’est de l’humain, j’ai une grande confiance dans mon équipe et c’est l’essentiel.
L’info de H-UP : Quelles aides pour l’aménagement de poste du chef d’entreprise en situation de handicap ?
Le chef d’entreprise peut bénéficier du soutien de l’agefiph pour l’aménagement de son poste de travail, certaines aides peuvent être accordées par la maison départementale des personnes handicapées, en particulier pour les déplacements.
Découvrez Argentic music !
